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Discours du 10 mai 2009

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Discours du Collectif161 à la Cérémonie Officielle du 10 mai 2009 en présence des représentants des Institutions et des association :

- Madame le secrétaire Générale de la Préfecture,
- Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
- Mesdames et Messieurs les Députés,
- Madame la Vice-Présidente du Conseil Régional,
- M. le Maire de Toulouse,
- Mesdames et messieurs les Elus,
- Mesdames et messieurs,
La dizaine d’ associations, constituée en COLLLECTIF 161, qui a préparé cette commémoration de l’ABOLITION de l’ESCLAVAGE, de la TRAITE NEGRIERE TRANSATLANTIQUE et de l’OCEAN INDIEN, m’a confié la mission de vous faire entendre le discours suivant :

Aujourd’hui est le jour dédié, dans l’hexagone, à la mémoire de nos valeureux ancêtres, déportés, torturés, humiliés, assassinés, sans jamais qu’ils baissent les bras pour la défense de leur « humanité ».

Ne devrions-nous pas nous poser la question de savoir si un « acte de contrition » ne serait pas nécessaire pour « pardonner » et « dépasser» ce lourd passé commun ?

Car, ces fils de l’Afrique mais aussi les Amer-Indiens
(Caraïbes et Arawaks), qui n’ont eu de cesse de combattre les atrocités de l’esclavage pour garantir à, nous, leurs descendants :
- Guadeloupéens,
- Guyanais,
- Martiniquais,
- Réunionnais,
aujourd’hui, citoyens français, la place qui est la nôtre, ne le mériteraient-ils pas ?

Nous ici présents, mais aussi l’ensemble des citoyens français, les humanistes du monde entier, la ville de Toulouse, qui dès l’An 1226, accordait la liberté à tout esclave réfugié dans ses murs, devons leur rendre hommage en honorant leur mémoire. C’est pourquoi, je demande que nous observions une minute symbolique, de silence, au seul son du tambour (quelques notes « K » sur la musique de « 150 ans » de Soley Nwè ).
Il leur a fallu beaucoup d’Amour, d’abnégation, de courage, d’honneur, de dignité, d’esprit de sacrifice pour, sous le joug des atrocités, penser à se battre pour des lendemains meilleurs, pour nous : leurs fils et filles.

Nous leur disons : « Merci », (merci, repris en chœur par la foule)
- merci, pour nous avoir aimé au sacrifice de leur vie,
- merci, pour nous avoir transmis des valeurs de courage et de dignité,
- merci, pour nous guider sur la route de l’apaisement,
- merci, pour permettre à nos enfants : · noirs, · métis, · blancs
de contribuer, aujourd’hui, au développement harmonieux de l’Humanité toute entière, jusqu’à voir un jour briller « l’homme dans toute sa diversité, richesse de l’Humanité ».

Ce travail de mémoire que nous leur devons, ne doit pas s’arrêter à un regard dans le passé, même s’il est bon de se rappeler, pour une meilleure connaissance de l’Histoire :
qu’en 1626, Pierre Belain d’Esnambuc, flibustier normand, obtint le soutien de Richelieu, pour s’emparer de la Guadeloupe et de la Martinique où il entreprit d’exterminer les indiens pacifiques qui y vivaient.

A la suite de quoi, faute de main d’œuvre, en quantité suffisante, Charles François d’Angennes, affublé du titre de Marquis de Maintenon se chargea, dès 1672, à partir du navire le « sybille » d’aller chercher sur les côtes de l’Afrique nos premiers pères et mères enchaînés et vendus comme esclaves.

Il faut retenir que ce Charles, François d’Angennes, fut l’un des initiateurs français de l’esclavagisme antillais : il signa en 1673, un contrat avec la compagnie du Sénégal, créée par Louis XIV, spécialisée dans la traite négrière, contrat, où il s’engageait à fournir 1600 esclaves en 4 ans. Il devint, par la suite gouverneur de Marie-Galante, en Guadeloupe. Il s’installa, ensuite, à la Martinique avec 200 esclaves et devint en 1685, le plus riche planteur de canne à sucre.

La première abolition de l’esclavage intervenue, à la Révolution française, fut l’aboutissement des incessantes luttes et révoltes menées par les esclaves. Elle dura de 1794 à 1802. Sous l’impulsion de l’Impératrice Joséphine, fille d’un colon Martiniquais, esclavagiste, Napoléon Bonaparte, rétablit l’esclavage en 1802, malgré les rudes combats menés par nos valeureux ancêtres : « Delgrès, Ignace, la Mulatresse Solitude…. ».

Nous devons nous rappeler cet acte mémorable et tragique où des centaines d’hommes, le 28 mai 1802, se sont fait sauter la cervelle en criant : « vivre libre ou mourir » sur les contreforts du Matouba en Guadeloupe, plutôt que d’accepter le rétablissement de l’esclavage.

Jamais, nos ancêtres, n’ont lâché prise dans ce combat pour la liberté et la dignité. Ils se sont battus sans relâche, souvent avec férocité, jusqu’à la proclamation du décret du 27 avril 1848 qui abolit définitivement l’esclavage. Il faut pour cela saluer l’intervention du Député Victor Schoelcher !

Ce bref rappel historique pour comprendre l’ampleur et la détermination du grand mouvement populaire que viennent de traverser la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion.
« Histoire » qui rend insupportable l’acceptation des injustices sociales, économiques et sociétales qui ont cours dans nos départements-régions.

Nous saluons la présence parmi nous du représentant de C. L.K.P qui a fait le déplacement depuis Paris. En effet, malgré l’abolition, malgré la départementalisation, les structures et systèmes hérités du temps de la colonisation n’ont pas totalement disparus et les mentalités et comportements liés à cette époque de domination et de tragédie humaine, perdurent.

Pour exemple l’interrogation d’un sous-Préfet de Pointe-A-Pitre, qui s’étonnait que l’ensemble des chefs de service, en Guadeloupe, soit blanc, alors que 90% de la population est noire.

Le combat d’aujourd’hui est la poursuite du combat de Hier pour une vie meilleure, une société nouvelle mais surtout pour l’apprentissage d’un « vivre ensemble », harmonieux, égalitaire et avec comme seul et unique couleur : « l’Homme ». Pour cela, nous devons, chacun, nous engager à combattre ce fléau fondé sur l’ignorance, la bêtise et l’ignominie, qu’est le racisme, à l’origine du colonialisme et de l’esclavage.

Les « ETATS GENERAUX », décidés par le Gouvernement, devront s’ingénier à ce travail de dépoussiérage des esprits, mentalités et attitudes pour parvenir à redonner confiance dans la République à des citoyens tant éprouvés. Il n’est plus tolérable, au XXIè siècle, que soient encore vénérées, dans nos départements, des puissances et structures bâties sur le sang et la sueur de nos ancêtres. Qu’ici ou ailleurs, des Hommes soient infériorisés ou discriminés au seul fait de la couleur de leur peau ou de leur origine.

Nous devons tous contribuer à faire cesser cela, pour des lendemains sereins dans notre société. Il s’agit d’une obligation morale qui aura valeur de mesure de justice historique.

Car si nous ne sommes pas responsables du Passé, nous le sommes du Présent ! Nos attitudes et mentalités doivent évoluer pour nous permettre d’avancer et vivre ensemble tout en assumant notre Histoire ! Raison pour laquelle nous saluons la présence de la France à la conférence sur « le racisme » organisée le 20/04/2009, par l’ONU à Genève.

La route est encore longue pour bannir de la société ce couple infernal qu’est : « discrimination et racisme ». Nous devons, chacun, réviser nos valeurs et nos comportements pour assumer « multiculturalisme » et diversité », la clef de voûte d’une société « de toutes les couleurs ».

Car « le monde est dangereux à vivre, non pas à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire » : Albert EINSTEIN.

Une suggestion, si je puis me permettre : rendez-vous au Parc de la Villette à Paris où se tient une formidable exposition: « Kréyol Factory » ! Sur 2500 M2, le comédien Guadeloupéen Jacques MARTIAL, fait découvrir les identités créoles, un « condensé de mondialisation », né de la rencontre, souvent violente, entre les peuples de l’Amérique, de l’Afrique, de l’Europe et de l’Asie. Culture, dont est, notamment, issu ce grand homme politique que fut l’écrivain- poète Martiniquais : Aimé CESAIRE.

La « culture créole », laboratoire d’identités multiples est une porte ouverte pour le « vieux monde » qui doit apprendre à vivre la diversité dans le respect des différences!

Nous terminerons notre propos par des remerciements à :

  • Mme Christiane Taubira, députée de la Guyane, pour son combat pour faire reconnaître l’esclavage comme « crime contre l’Humanité »,
  • Mme Maryse CONDE, écrivain Guadeloupéen, présidente du comité pour la mémoire de l’esclavage ainsi que Mme Françoise VERGES, écrivain réunionnais, maître de conférence, membre de ce même comité, qui ont proposé la date du 10 Mai, comme jour de commémoration nationale.
  • M. le Préfet, pour sa présence, preuve de l’importance qu’accorde le Gouvernement à cette commémoration,
  • M. le Maire de Toulouse, pour son engagement à nos côtés, avec une reconnaissance toute particulière à M. MAKENGO, son adjoint, qui nous a soutenus, accompagnés tout au long de la préparation de cette commémoration, (ovation de l’assistance).
  • L’ensemble des associations, membres du collectif 161 : AGART, KEMIT, le CRAN M-P, FWIDOM, METYSS « DYZ », KALOU, CARAT, GWAMAGUY, Chercheurs d’Autres, Festicréole, …sans oublier la participation du peintre Jean-Jacques DRUAUX, …
  • Merci à René, David de l’AGART, David de FWIDOM, Sabrina, Joséphine, Jean……pour leur investissement dans l’organisation de la manifestation,

Merci pour leur soutien à :

  • L’ ACSE (Agence pour la cohésion sociale et l’égalité des chances )
  • l’Ambassade des Etats-Unis en France
  • au Comité de soutien L.K.P. de Paris

Merci à nous, tous ici, présents.

Pour le Collectif 161,

Christine HOUBLON

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